Bonne lecture.
L’équipe médicale du CIEM.
Le dépistage du cancer de la prostate en 2017
Pourquoi dépister le cancer de la prostate ?
Le cancer de la prostate se situe en France au premier rang des cancers avec une estimation à plus de 70 000 nouveaux cas par an, devant les cancers du poumon et les cancers colorectaux. Son incidence est en forte augmentation (+ 8,5 % par an entre 2000 et 2005) en raison de l'effet combiné du vieillissement de la population, de l'amélioration de la sensibilité des techniques diagnostiques et de la diffusion du dépistage par dosage du PSA.
Parallèlement, on observe une diminution du taux de mortalité : près de 8 870 décès chaque année (en moyenne - 2,5 % par an sur cette même période). Avec une survie relative à 5 ans estimée à près de 80 %, il s'agit d'un cancer de bon pronostic. L'âge moyen au moment du diagnostic est de 71 ans.
Quelle est la circonstance de découverte du cancer de prostate ?
La circonstance la plus habituelle de découverte est donc liée au dosage de PSA sérique. Lorsque ce dernier est anormalement élevé, l'analyse doit être approfondie se basant notamment sur la cinétique de progression, le ratio PSA libre / PSA total. Plus rarement, la lésion est découverte à l'occasion d'un examen clinique avec toucher rectal.
Une controverse entre les urologues et l'Institut National de Cancérologie (INCA) concernant le dépistage du cancer de la prostate est apparue en 2016. L'INCA proposait de limiter le dépistage du cancer de la prostate se basant sur les arguments suivants :
- 2 études ont montré l'absence d'impact sur la mortalité.
- 70 % des PSA élevés ne sont pas en relation avec la présence d'un cancer.
- La chirurgie présente des effets secondaires affectant la qualité de vie :
- Dysfonction érectile,
- Incontinence urinaire.
Sur ces arguments l'INCA proposait que les médecins informent les patients des avantages, inconvénients et conséquences du dépistage par le dosage du PSA ; ceci mettait alors en doute l'utilité du PSA et la polémique est largement intervenue dans les médias. A contrario, les urologues ont souhaité maintenir un dépistage généralisé du cancer de la prostate par le dosage du PSA arguant que :
- Les études d'impact sur la mortalité sont anciennes et de méthodologie très critiquable.
- Les pays qui n'utilisent pas le PSA ont un taux de maladie avancée, notamment avec des métastases osseuses, 4 à 8 fois plus important que ceux qui ont recours à ce marqueur.
- Les études sur lesquelles se basent l'INCA ne tiennent pas compte (en raison de l'ancienneté des données) :
- De l'utilisation de l'IRM qui permet d'identifier des zones cibles intra prostatiques. L'IRM est dorénavant de plus en plus réalisée avant toute biopsie de prostate et ainsi permet d'éviter un nombre non négligeable de biopsies.
- Du concept récent de surveillance active : chez certains patients dont le diagnostic de cancer de prostate a été posé, il s'agit d'une option qui repose sur des critères bien définis de sélection des patients éligibles et des critères de suivi dans le temps. L'objectif est de surveiller le patient et de ne proposer la mise en œuvre des ressources thérapeutiques que lorsqu'une évolutivité péjorative de la maladie sera constatée. Cette option de prise en charge n'est pas toujours facile à expliquer : il faut à la fois dire au patient qu'il a un cancer et lui dire que ce n'est pas grave… L'impact psychologique est important. Cette surveillance n'est pas adaptée aux patients anxieux. La surveillance porte sur l'examen clinique, le dosage du PSA, l'IRM et la répétition des biopsies.
Quels sont les critères qui permettent de décider de l'option thérapeutique ?
Il n'y a pas un cancer de la prostate mais des cancers de la prostate... Et tout l'enjeu aujourd'hui est de savoir, grâce à certains moyens d'analyse, si ce cancer est très agressif, moyennement ou peu agressif pour proposer le traitement le plus adapté à la situation. Quatre paramètres sont essentiels pour guider le choix de traitement :
- L'agressivité de la lésion (déterminée par le résultat des biopsies),
- Le volume de la lésion,
- Les caractéristiques de la glande prostatique elle même,
- L'état général du patient.
En fonction de toutes ces données, une réflexion s'engage alors avec le patient. Il faut bien peser les avantages et les inconvénients de chaque traitement et se donner le temps de décider. Sauf exception, on ne se trouve jamais dans une situation d'urgence. On a plusieurs semaines, voire plusieurs mois, pour prendre la meilleure décision qui peut, par ailleurs, être de ne rien faire… dans l'immédiat.
En conclusion, compte tenu de l'ensemble de ces données, l'équipe médicale du CIEM a toujours maintenu la poursuite du dépistage du cancer de la prostate au cours du bilan.
Article relu par le Pr François HAAB.
Directeur Médical du CIEM